Point Juridique n°24 : La crime de génocide
ORIGINE :
La notion de génocide est utilisée pour la première fois en 1944 par Raphaëm Lemkin, un juriste juif polonais réfugié aux Etats-Unis à la suite de l’invasion de la Pologne par l’Allemagne nazie. Dans son ouvrage Axis Rules in Occupied Europe, il forge ce mot en combinant genos (clan ou race) et cide (tuer).
Au lendemain de la Seconde guerre mondiale, l’Assemblée générale des Nations Unies reconnait le génocide comme un crime en adoptant, à l’unanimité le 9 décembre 1948, la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (dite “la Convention” dans le reste de l’article).
En 1998, avec l’adoption du Statut de Rome, le génocide devient un crime international, relevant de la compétence de la Cour pénale internationale, aux côtés des crimes contre l’humanité, des crimes de guerre et du crime d’agression.
DÉFINITION :
Le génocide se définit comme « l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux ». Il est constitué par :
- le meurtre de membres du groupe,
- l’atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe,
- la soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle,
- par des mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe,
- par le transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe.
Un seul de ces cinq acte suffit à qualifier de génocide.
Toute la spécificité de ce crime tient dans l’intention systémique de détruire des individus, non pas en tant qu’individu, mais en tant que membre d’un groupe.
Il est important de noter que le génocide peut se produire aussi bien en temps de guerre qu’en temps de paix.
SANCTIONS :
La Convention contraint tout les États à la respecter, même ceux ne l’ayant pas ratifiée, car ses principes appartiennent au droit international coutumier.
Ainsi, toute personne, ou tout État, ayant commis un génocide, qu’elle soit commanditaire ou commettante, peut être poursuivie sans possibilité de se prévaloir d’une immunité, par :
- La Cour internationale de Justice pour juger les Etats,
- La Cour pénale internationale pour juger les individus,
- Un tribunal pénal international ad hoc pour juger des faits commis dans une situation donnée,
- Les tribunaux nationaux, sur le fondement de la compétence universelle, si les faits sont commis en période de conflit,
Il est crucial que la coopération internationale soit effective pour garantir que les sanctions du génocide soient appliquées. En effet, la CIJ et la CPI n’ayant pas de pouvoir de contrainte, chaque État a l’obligation de prendre les mesures nécessaires pour prévenir et punir les génocides.
LES GÉNOCIDES DU XXe ET XXIe SIÈCLE :
- 1904-1908 : Génocide en Namibie
- 1915-1917 : Génocide arménien (reconnu par les Nation Unies, le Parlement européen et le Conseil de l’Europe)
- 1941-1945 : La Shoah (reconnu par les Nations Unies et l’Union européenne)
- 1975-1979 : Génocide cambodgien (reconnu par le Tribunal pénal international, par les tribunaux cambodgiens)
- 1994 : Génocide rwandais (reconnu par les Nations Unies, par le Tribunal pénal international pour le Rwanda)
- 1995 : Génocide bosniaque à Srebrenica (reconnu par la Cour internationale de Justice, par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie)
- 2014 : Génocide des yézidis par Daech (reconnu par les Nations Unies, le Parlement européen)
- 2016-aujourd’hui : Génocide des rohingyas (rapport des Nations Unies)
- 2023-aujourd’hui : Génocide à Gaza (saisine de la Cour internationale de Justice)
Sources :
- Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide.
- Statut de Rome.
- Qu’est ce qu’un génocide ?, amnesty.fr/focus/qu-est-ce-qu-un-genocide, [Consulté le 9/4/2025].
- Génocide, dictionnaire-droit-humanitaire.org/content/article/2/genocide, [Consulté le 9/4/2025].
- Avis consultatif de la Cour du 28 mai 1951, icj-cij.org/fr/node/100085.